Ou l'histoire d'un grand Secret...

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L'abbé Gélis - Rennes-le-Château Archive

L'abbé Gélis

ou l'histoire d'un prêtre assassiné

Rennes‑Le‑Château ou l'histoire d'un grand secret

 

 

Antoine Gélis

 

Né le 1er avril 1827
Mort assassiné le 1er novembre 1897

 

   On connaît peu de choses sur ce prêtre du Haut‑Razès, mais la fin de sa vie et sa disparition sont entourées d'un épais mystère.

 

   Aussi discret qu'Henri Boudet, il est souvent oublié dans l'affaire de Rennes‑le‑Château. Pourtant son assassinat fournit des clés de recherche que l'on ne peut écarter.

 

   Dans la série des mystérieux curés  du Haut‑Razès, voici celui qui protège une énigme digne d'un grand roman policier.  En effet, cette affaire dans l'affaire qui attira de nombreux passionnés est celle de la mort mystérieuse de l’abbé Antoine Gélis et des liens qui l'unissaient à Bérenger Saunière, Alfred Saunière et Henri Boudet.

 

    Curé de Coustaussa, un petit village situé à quelques kilomètres de Rennes‑Le‑Château, il fut retrouvé avec des pièces d'or cachées dans son presbytère. En savait‑il trop ? A‑t‑on voulu le faire taire ? Le mystère est entier...

 


L'histoire d'un meurtre

   Jean Antoine Maurice Gélis est né le 1er avril 1827 à Villesèquelandes dans les Landes. Il fut d'abord curé de Durban, puis de Lanet en 1855.

 

 

   Il fut ensuite nommé à Coustaussa en 1857.


Coustaussa près de
Rennes‑le‑Château

 

   Au matin de la Toussaint, le 1er novembre 1897, Antoine Gélis, 70 ans, fut trouvé gisant sans vie dans une flaque de sang, sur le sol de la cuisine de son presbytère. Il était habillé et portait son chapeau d’ecclésiastique.

 

   Sa montre était arrêtée précisément sur 12 heures et 15 min (minuit 15 minutes). Le corps fut découvert le jour même par son neveu inquiet de ne pas l’avoir vu :

   « Il entra dans la cuisine, appelant de nouveau, lorsque trébuchant sur une masse informe, il faillit tomber ; regardant alors à ses pieds, à la lueur qui filtrait à travers les volets clos de la cuisine, il vit et reconnut son oncle couché sans vie dans une mare de sang. Affolé à cette vue, il est sorti dans la rue où il faillit s’évanouir. »


La maison de l'abbé Gélis où il fut assassiné

 

Devant l’horreur du crime, des mesures furent prises immédiatement :

   « Le maire fit immédiatement fermer les portes du presbytère et envoya un express à Couiza avec mission de prévenir la justice et la gendarmerie. Également prévenu, Monsieur Pugens, juge de paix à Couiza, qui se transporta immédiatement sur les lieux du crime. Attendant l’arrivée du parquet de Limoux, il procéda à l’apposition des scellés »

 

Voici ce que fit paraître "Le courrier de l'Aude" :

   Couchée dans une mare de sang dont sa soutane est largement souillée, la victime a les mains ramenées sur sa poitrine et l'une de ses jambes repliées est ramenée au‑dedans. L'abbé Gélis, frappé par son meurtrier avec une violence et un acharnement inouïs, ne porte pas moins de 14 blessures horribles à la tête, un peu au‑dessus de la nuque. En plusieurs endroits, le crâne est fracturé et le cerveau mis à nu. 3 blessures de moindre importance s'étalent sur la face même du cadavre. Les cloisons et le plafond de la cuisine sont souillés de larges taches de sang. Tandis que quelques blessures paraissent faites à l'aide d'un instrument contondant, certaines autres paraissent l'avoir été avec un instrument tranchant. La victime n'a pas succombé sans opposer de résistance.
Une somme de 500 F a été trouvée intacte, cependant les tiroirs étaient ouverts et on avait fouillé tous les meubles. Le plus grand mystère continue à régner sur ce meurtre. Aucun témoin, aucun soupçon, aucune piste à suivre.

 

   Les autorités utilisèrent les grands moyens pour surprendre l'assassin inconnu. Selon « le courrier de l’Aude » cité par Patrick Ferté :
 

   «Toutes les brigades de gendarmerie sont sur pied ; elles ont reçu l’ordre de veiller sur les routes et dans les campagnes. Les gendarmes de Perpignan cernent la frontière ; ceux de Limoux, de Couiza et des environs redoublent de zèle et de vigilance.»

 

   L'assassin du curé Gélis ne devait jamais être découvert.

   L'affaire de l'assassinat eut même un écho national comme le montre cette coupure de presse extraite du Petit journal de Paris 1897

Le Petit Journal de Paris 1897

 

Les faits envisagés selon le dossier d'instruction

 

   L'enquête ouverte par le Ministère Public et par le Juge d'Instruction de Limoux a été initiée le 2 novembre 1897, le lendemain du décès de Gélis. Ce dossier a été retrouvé par deux avocats, Julien Coudy et Maurice Nogué, et publié sous forme d'une analyse dans le Midi Libre, le 3 octobre 1975. Voici un extrait de l'article :

    "Les précautions prises démontrent une présence d'esprit incroyable. La cuisine après un tel saccage, est retrouvée dans un ordre parfait, aucune empreinte de pas. Le meurtrier a su éviter les trois grandes flaques de sang. Aucune trace à l'extérieur. À l'étage, dans la chambre de l'abbé Gélis, deux gouttelettes minuscules attestent le passage de l'assassin qui a, sans laisser la moindre empreinte sanglante, forcé la serrure d'un sac de voyage qui contient divers papiers et documents appartenant au prêtre.

     L'assassin a ouvert le sac, non pour voler, mais pour chercher quelque chose. En effet, dans le bureau du prêtre, on retrouve 683 frs en or et en billets; dans sa commode, on retrouve 106 frs 90. Plus curieux encore, le cadavre a été rangé vers le centre de la pièce, sur le dos, la tête et la figure dans une position normale, les mains ramenées sur la poitrine, comme un gisant. De ce drame sanglant, commis sans motif apparent, nous n'avons qu'un témoin muet: alors que l'abbé ne fume pas et déteste les odeurs de tabac, flotte, dans la deuxième flaque de sang, près de la fenêtre, un carnet entier de papier à cigarettes de marque Tzar avec sur une feuille, au crayon, la mention, «Viva Angelina».

     Le curé Gélis, de nature méfiante, vivait cloîtré dans son presbytère et avait reçu, ce soir là, une visite tardive... Le Juge d'instruction inculpe le neveu du prêtre, le 13 avril 1898, mais la Cour d'appel de Montpellier rendra un non‑lieu le 2 août 1898. Le neveu, toujours à la recherche d'argent, harcelait le vieux prêtre et pour l'opinion publique se trouvait être le suspect le plus convenable; en fait, ce dernier, la nuit du crime, était à Luc‑sur‑Aude... Il dût quitter le pays, poursuivi par la suspicion populaire. L'enquête ne fut jamais poursuivie..."

 

Les premières conclusions :

  • Gélis est méfiant : Antoine Gélis vivait seul et ne fréquentait personne. Il était méfiant, dormait toute l'année avec les volets clos, même l'été. Il fit poser une clochette à la porte d'entrée du presbytère et sa porte était constamment verrouillée, ce qui est rarissime dans les villages en ce temps là. Que pouvait craindre Gélis ? Le presbytère est situé au coeur du village, entouré de maisons très rapprochées.
      
    De quoi avait‑il donc peur dans son presbytère barricadé, n’ouvrant qu’après un mot de passe ? Que cachait‑il dans ses tiroirs de plus précieux que son argent et ses chandeliers ?

  • Un crime bestial : On supposa que le prêtre était assis dans un grand fauteuil près de la cheminée lorsque, dans le courant de la soirée, il reçut un visiteur. La conversation s’engagea alors entre les deux hommes, quand soudain le visiteur se leva, passa derrière le fauteuil et, s’étant emparé des pincettes à feu, frappa sauvagement le prêtre à la tête. En dépit de ses sérieuses blessures, Gélis parvint à se mettre debout et se dirigea vers la fenêtre qui donne sur la rue, dans l’intention sans doute d’appeler à l’aide. L’assassin le suivit et, armé cette fois d’une hachette, acheva sa sinistre besogne.

  • Une mise en scène très étudiée : A ce stade on pourrait supposer que le crime a été irréfléchi, commis sous l'emprise de la colère, mais bien au contraire. L'assassin démontre une parfaite présence d'esprit (noté par le juge dans son procès verbal du 2 novembre 1897) : Les policiers trouvèrent des éclaboussures de sang pratiquement partout, même au plafond. En dépit de la confusion et du carnage qui dut avoir lieu, le meurtrier fut assez méticuleux pour nettoyer et ranger entièrement la cuisine de sorte que, dans les grandes flaques de sang, on ne retrouva aucune empreinte. Aucun meuble n'était renversé. Aucune trace à l'extérieur. En outre, pour quelque raison mystérieuse, l’assassin prit la peine de repositionner le corps vers le centre de la pièce. Celui‑ci était couché sur le dos, la tête et la figure dans une position normale, les bras croisés sur la poitrine comme un gisant. C'est aussi la position que l’on donne communément aux défunts, et qu'un prêtre aurait pu faire.
     

  • Que cherche l'assassin ? On retrouva seulement deux petites gouttes de sang au premier étage, dans la chambre du prêtre. Là, l’assassin ouvrit un porte‑documents qui contenait de nombreux papiers privés. Mais le contenu du porte‑documents étant resté intact, on conclut que le meurtrier cherchait autre chose. Un fait évident, l'objet de la fouille n'était pas l'argent puisque l'on retrouva dans un bureau 683 F en pièces d’or et en billets et dans sa commode 106,90 F. Les tiroirs étaient ouverts et on visita tous les meubles ! La serrure d'un coffre fut également forcée.
     

  • La seule piste : Le seul élément de preuve que l’on découvrit fut un carnet de papier à cigarettes presque intact de la marque peu courante "Le Tzar". Gélis ne fumait pas et détestait que l’on fume en sa présence. Sur l’un des papiers à cigarette, on trouva inscrits d’une écriture malhabile, les mots "Viva Angelina". Ce message est sans doute un avertissement à l’usage des initiés, comptant sur la presse pour le rapporter. L’instruction fit parler au maximum cet indice. On interrogea tous les débitants de tabac du département. Aucun ne vendait ni n’avait jamais vendu de papier cigarettes de marque « Le Tzar ». Il venait d’au‑delà du département.

  • Gélis connaissait le meurtrier : L’autopsie révéla que Gélis avait été assassiné entre 3h et 4h du matin. Tous les villageois savaient que Gélis était un homme nerveux et avait peur des intrus. Il gardait toutes les issues de sa maison aussi closes que possible: barres aux portes et volets rabattus aux fenêtres, même pendant les mois les plus chauds de l’été. Il est donc évident que si un visiteur s’était présenté chez lui tôt le matin, cette personne devait lui être familière. D'ailleurs, la clochette d'alarme a été neutralisée cette nuit‑là et la porte d'entrée n'a pas été fracturée. L'abbé connaissait donc très bien son assassin... On suggéra que l’assassin venait emprunter de l’argent au curé ou bien encore qu’il venait récupérer une promesse de dette : cela ne tient pas. car le mystérieux visiteur ne fut pas reçu comme un obligé, un débiteur soumis, mais au contraire comme un « maître ». En effet, il fuma et but devant l’abbé qui détestait notoirement le tabac, comme en témoignent l’odeur, le papier à cigarettes Tzar, et deux bouteilles entamées de banyuls et de porto. 

  • La montre cassée : La montre au poignet de Gélis indiquait 12h15 Cependant, si le meurtre eut lieu entre 3 heures et 4 heures du matin comme l'affirme l'autopsie, il semblerait que le meurtrier ait changé l’heure de la montre, puis la brisa afin de figer les aiguilles.

 

Un coupable trop facile

 

   Au cours des mois qui suivirent l’événement, on soupçonna Joseph, le neveu de l’abbé Gélis qui avait des problèmes financiers et avait emprunté 100 F à son oncle. Joseph assura que le soir en question il ne se trouvait pas à Coustaussa, mais avait accompagné son épouse à Luc‑sur‑Aude, où la femme d’un de leurs fils était sur le point d’accoucher. Pendant la soirée, il fut obligé de revenir à Coustaussa et profita de l’occasion pour rendre visite à l’abbé Gélis et lui annoncer la bonne nouvelle. Il arriva vers 19h 30 et repartit vers 21h pour Luc‑sur‑Aude.

   Le 14 décembre suivant, les autorités de Montpellier reçurent une lettre anonyme exprimant l’étonnement de voir que Joseph n’était toujours pas sous les verrous. Peu à peu, des fragments d’information, de nouveaux témoins, et de nouvelles déclarations commencèrent à desservir Joseph.

   On l’arrêta et on le maintint en détention, mais les magistrats de Montpellier ordonnèrent son élargissement, et il fut libéré le 2 août 1898 suite à un non‑lieu rendu par la cour d'appel. Le présumé coupable n'était pas dans la région la nuit du meurtre.

 

Une visite singulière

 

   18 jours avant le drame, l'abbé Gélis reçut une visite inhabituelle. Entrant dans la sacristie à l'improviste, sa nièce le trouva en compagnie d'un homme assis sur une chaise et qu'elle ne put distinguer. Gélis referma aussitôt la porte pour empêcher sa nièce d'identifier le visiteur. Plus tard, il répondit à sa nièce que c'était un ami. Notons que les amis d'un prêtre qui n'en a guère sont souvent d'autres prêtres.

 

Des revenus mystérieux

 

   L'abbé Gélis percevait de l'état 900 F par an et quelques fermages. Ses comptes de 1895 à 1897 le prouvent : il dépensait 700 F par an. Or, un de ses vieux amis, le curé‑doyen de Trèbes, dira au juge que depuis 3 ans Gélis lui confia 1000 F par an à placer pour lui en obligations du chemin de fer. Le doyen le reçut encore en visite le 24 septembre 1897 et à cette occasion Gélis lui remit 1200 F aux mêmes fins ajoutant de NE JAMAIS LUI ÉCRIRE A CE SUJET. D'où provenaient ces recettes?

 

Document codé et trésors cachés

 

   Les surprises que réservait Gélis ne s'arrêtèrent pas là. Sa maison était truffée de trésors cachés : Le juge d’instruction, transporté au presbytère de Coustaussa, le 4 novembre 1897, trouva un écrit de l’abbé épinglé à une note de dépense du 24 septembre 1897, et rédigé le jour même de sa visite au curé‑doyen de Trèbes. Cet écrit révéla que l’abbé cachait pour 13 000 Francs (soit de quoi vivre durant 20 ans !) de pièces d’or en divers endroits de sa maison et de la sacristie. Le document était en outre codé.

 

Le juge inventoria :

 

   « 4000 F sous un tabernacle, 2000 F sous un rochet. Cela pour la sacristie « enfoncée dans la  terre au deuxième sous‑sol ». Puis « au presbytère on découvrit pour 1000 F de jaunets (pièces d’or) dans le chambranle de la cheminée de la chambre ; autant dans le prie‑Dieu, autant sous une pierre des lieux d’aisance, autant sous le plancher du grenier ; autant dans une dépendance, sans parler de diverses sommes dans les livres de la bibliothèque. Il y en avait partout pour 11400 F, en napoléons de 20 et 10 F renfermés dans de vieux morceaux de tuyaux de poêle, ou des tubes en fer blanc. »

 

   Seuls, les 1000 F signalés dans une cave ne furent pas retrouvés. Sans doute y sont‑ils encore.

   Pourquoi l’abbé Gélis aurait‑il codé l’emplacement de ses cachettes ? Depuis quand ce trésor ? Pourquoi ? Comment ? Quel langage dissimulé avait utilisé le prêtre pour que le juge comprenne les lieux signalés des caches ? Que contenait le document ? L’affaire demeurera à jamais mystérieuse.

 

Résumé des faits

  • Gélis était méfiant et en permanence sur ses gardes

  • Gélis était riche et cachait un trésor chez lui, comment ?

  • Gélis disposait d'un écrit codé, pourquoi ?

  • Gélis attendait le visiteur tard dans la nuit, la clochette étant rendue muette

  • Gélis connaissait son meurtrier

  • L'assassin était méticuleux et certainement intelligent

  • L'assassin déploya une énergie bestiale lors du meurtre

  • L'assassin mit en scène son meurtre et déposa intentionnellement un seul indice: "Viva Angélina"

  • L'assassin cherchait un objet ou un papier mais certainement pas de l'argent

  • L'assassin a fouillé partout et savait‑il ce qu'il cherchait ?

  • Malgré la proximité du presbytère avec d'autres habitations, l'exiguïté du village et la violence de l'acte, personne n'a rien vu, ni rien entendu.

  • Le document codé ne fut jamais connu, pourquoi ?

 

Sa tombe

   Son enterrement eut lieu à Coustaussa avec la participation de Saunière, de Boudet, des prêtres de Couiza, d'Arques, de Montazels, de Luc‑sur‑Aude et d'Antugnac. On nota également la présence du représentant de l'évêque de Carcassonne, le Vigário‑Geral Cantegril. La cérémonie se déroula sans incident.

 

   La tombe de l'abbé Gélis est toujours visible dans l'ancien cimetière de Coustaussa. Elle se dresse aux deux tiers de l'allée qui traverse l'étroit cimetière en pente. Mais fait curieux, contrairement aux autres sépultures qui sont orientées au couchant, celle‑ci est orientée vers Rennes‑le‑Château ...

 


L'ancien cimetière vue d'en haut
Le château de Coustaussa au fond


L'ancien cimetière vue d'en bas
La tombe de Gélis au centre

 


La tombe de Gélis


Son épitaphe est encore visible

 

   On remarquera la stèle surmontée de l'emblème de la Rose‑Croix (symbole des rosicruciens)

 

   Incontestablement Antoine Gélis fait partie des mystérieux curés du Razès avec Saunière et Boudet. Il sut comme eux emporter son secret dans sa tombe.

 

 

 

 

Ci‑dessous le texte de l'épitaphe :


L'emblème de la Rose‑Croix

 


SOUVENEZ‑VOUS DANS VOS PRIERES
de l'âme de
Mr GELIS ANTOINE
Curé de Coustaussa de 1857 à 1897
Assassiné dans cette paroisse
Victime de la haine des méchants
Dans la nuit du 31 octobre
Au 1er novembre 1897

Erat vir simplex et rectus, ac timens
Deum, et recedens a malo.

+
Hic est veré Martyr, qui pro christi
nomine sanguinem suum fudit.
 

 

Gélis ‑ Boudet ‑ Saunière

   Les bonnes relations qu'entretenaient habituellement les prêtres des paroisses voisines étaient courantes à la campagne. Cependant la collaboration des abbés Saunière, Gélis et Boudet débordait largement des limites ordinaires. Bérenger Saunière était le benjamin, Gélis l'aîné, et Boudet était 10 ans plus jeune que Gélis. En 1886, année où Saunière découvrit les parchemins, Saunière avait 35 ans, Gélis 59 ans et Boudet 49 ans.

 

   Boudet et Saunière, marcheurs infatigables, partageaient le même goût pour l'histoire et l'archéologie de la région. Quant à Gélis et Saunière, a en croire leur correspondance, ils étaient très proches. Enfin, de façon inexpliquée, ils étaient riches tous les trois.

 

   Pourtant cette entente ne dura pas. En 1897, année de l'assassinat de Gélis, Saunière et Boudet ne se virent plus. La mort de Gélis brisa le trio, et on raconte que dans les jours qui précédèrent la mort de Saunière et Boudet, respectivement en 1917 et 1915, ceux‑ci reçurent également de mystérieux visiteurs.

 

Les mystères de l'affaire Gélis

Un document codé bien étrange

 

   La découverte par le juge d’un "document codé"  fut le tournant de l’enquête. Le 21 novembre, revenant sur cette affaire, "le courrier de l’Aude" précise :
« Un document précieux pour cette affaire vient d’être envoyé à Paris pour être soumis à une expertise. »


Que contenait ce document qui fut soustrait rapidement comme pour en limiter au maximum le nombre de témoins ? Ce qui est sûr et troublant, c'est que dès cet envoi, IL NE FUT PLUS JAMAIS QUESTION de l’enquête sur le crime de Coustaussa.

 

   Les autorités ont‑elles eu ainsi connaissance du mobile du crime et même de l’identité du (ou des) meurtrier ? Serait‑ce une affaire d'Etat ?
   Malgré tout, le document permit au juge de découvrir les innombrables cachettes où Gélis préservait son trésor.

 

L'hypothèse Saunière

 

   Une hypothèse à ce mystère est la suivante : Antoine Gélis, tout comme Bérenger Saunière et Henri Boudet, aurait eu connaissance de certains documents ou de certaines informations sulfureuses. Gélis était‑il en désaccord ? Voulait‑il faire chanter les autres protagonistes ? Avait‑il l'idée de parler ou de dévoiler certains secrets ? De dénoncer certains agissements ? 

 

   On sait que Gélis disposait d’un revenu personnel et qu’il avait prêté des sommes assez importantes pour financer ses affaires, parfois plusieurs milliers de francs à la fois. Ceci montre qu'il connaissait la valeur de l’argent malgré sa vocation spirituelle et qu’il devait disposer d’une source de revenus autre que celle de ses appointements.

 

   Saunière a peut‑être eu peur de voir s’en aller en fumée sa fortune, ses espoirs, ses rêves et ses ambitions. Peut‑être même que Gélis était prêt à tout dévoiler. Saunière a pu alors décider d’agir de manière à régler ce problème une fois pour toutes. Voilà ce qui pourrait aussi expliquer la réaction ténébreuse de l’abbé Rivière qui administra les derniers sacrements à Saunière.

 

   Saunière était un homme extrêmement intelligent, motivé et ambitieux. Il était aussi séduit par sa vie devenue mondaine, ne laissant personne interférer dans ses affaires. Il sut aussi s’envelopper d’un mystère qui suscita la suspicion en divers lieux. Ceci constitue en soi un argument en faveur de la thèse que Saunière était un homme qui n’aurait reculé devant rien pour pouvoir continuer à mener grand train.

 

   Les constatations effectuées sur le lieu du crime prouvent que l’assassin était méticuleux et que son crime avait été soigneusement mis en scène. L'assassin était connu de Gélis et devait être familiarisé avec la disposition de la cuisine et de son contenu. Cela signifie qu’il sut trouver sur place des instruments meurtriers. Si Saunière est notre mystérieux assassin, rien ne devait être laissé au hasard et surtout pas ce papier à cigarettes, un indice qui a dû être placé là pour égarer les enquêteurs. Cette pièce à conviction est remarquable à plus d’un titre : Pourquoi le meurtrier a‑t‑il voulu laisser une telle pièce à conviction ?  Pourquoi cette formule "Viva Angelina" ? 

 

   Quelle est la signification de ces deux mots ? L’homme qui a laissé derrière lui ce papier à cigarette était à la fois sûr de lui et arrogant. Il était convaincu que même si ce papier était découvert, personne ne serait en mesure de le désigner comme coupable. Il est à noter que le papier de marque TZAR était fabriqué en France, mais distribué en Hongrie. La Hongrie où d'ailleurs Saunière avait un compte en banque ...

 

   Saunière était un homme malicieux. Il a donc pu se jouer des enquêteurs avec son arme favorite : les messages secrets. Si l'on essaie de décoder VIVA ANGELINA avec le manuscrit Le sot du pécheur (1) on obtient un résultat surprenant.

 


Document Sot Pécheur prétendu être l'original

 

(1) Ce document mystérieux est en fait un bout de papier sur lequel sont gribouillées quelques lignes de la main de Bérenger Saunière. Ce court document aurait été trouvé parmi les effets personnels de ce dernier, après sa mort. Comme pour la plupart des éléments qui composent ce mystère, personne ne peut dire avec certitude si c’est bien Bérenger Saunière qui a composé ce texte, bien que le contenu le fasse penser. Son utilisation reste non connue à ce jour. Ce texte ressemblant à un cryptogramme garde donc son secret ...

 

V

I

V

A

A

N

G

E

L

I

N

A

 

Lorsqu’on regarde les lettres on aperçoit 4 chiffres romains: VIVI.
Si on les groupe, on peut obtenir : V  IV  I = V + IV + I = 10.
Si on groupe les 3 premiers chiffres on peut obtenir : V  IV = V + IV = 9
Ensuite nous lisons "A Angel", en français: un Ange.
Ensuite nous avons le dernier chiffre romain I et les lettres NA.

 

A présent si on revient à la note de Saunière "Sot pécheur". L’élément clé de ce message, apparaît également dans son énigme, "Un Ange", à la ligne 9. En confirmation de ceci, "Un Ange" commence à la 10ème lettre du début de la ligne et se trouve à la 9ème ligne.
 

Y

E

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Y

Y

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K

P

F

X

K

A

 

Si l'on reprend le même raisonnement :V  IV  I = V + IV + I = 10ème lettre.
Si on conserve uniquement le premier chiffre, on a
V  =  5ème ligne

On découvre alors le mot RETOURNA ce qui donne alors le message :

 

UN ANGE RETOURNA

 

Saunière aurait‑il voulu mettre en évidence ces mots qui ne peuvent être qu’une allusion à l’Ange de la Mort revenu accomplir sa vengeance ?

 

La piste Angélique

 

   Il est également étonnant de remarquer que si l'on utilise la langue des oiseaux (utilisée d'ailleurs dans certains cas par Saunière) et que la lettre volée est un "e", on obtient : VIVA  ANGELINEA

qui peut
alors se lire : VIVA ANGE LINEA ou plus exactement :"Vive la lignée des anges" Cette maxime est connue pour être associée à une société secrète :
"La société Angélique", dite "Le Brouillard" ou "L'église des lumières".

 

Elle fut fondée vers 1500 par l'imprimeur Sébastien Greiff dit Gryphe. Son livre de base est "Le songe de Poliphile" qui est un ouvrage codé. On trouve parmi ceux qui ont appartenu à ce groupe : Dante, Rabelais, Cervantès, Goethe, Dumas, Nerval, Georges Sand, Jules Vernes et beaucoup d'autres ...

 

Le songe de Poliphile

 

   "Le Songe de Poliphile", publié en 1546, est l'adaptation par Jean Martin de l'Hypnerotomachia Poliphili de Francesco Colonna (1453‑1538) , parue à Venise en 1499.

   Livre à clefs, profondément ésotérique, il est une ouverture sur la période d'activité intellectuelle de la Renaissance. Le Songe de Poliphile a joué, de par son caractère hermétique et allégorique, un rôle extrêmement important dans la création des jardins initiatiques de la Renaissance Italienne. Ce livre est orné de nombreux bois dus à un artiste inconnu.

 

   Divisée en 2 livres, l'œuvre met en scène la quête de Poliphile qui cherche sa bien‑aimée Polia dans un paysage de ruines, de palais et de temples antiques. Ce parcours allégorique, qui aboutit à la contemplation de Vénus dans les jardins d'une Cythère idéale, reste à interpréter. On peut y voir une libre reconstitution des "mystères d'amour" dont parlait Diotime dans Le Banquet. Quant au livre II, il évoque l'idylle contrariée des protagonistes dans la Trévise du Quattrocento. Connu pour la beauté de ses gravures, son influence sur l'art des jardins et les décors des fêtes de cour, comme l'une des expressions les plus achevées de l'esthétique de la Renaissance, Le Songe de Poliphile fait date dans l'histoire littéraire. Dès le premier tiers du XVIe siècle, Rabelais et d'autres s'étaient inspirés de l'œuvre de Colonna. L'adaptation de Jean Martin en a prolongé le rayonnement jusqu'à La Fontaine et Gérard de Nerval.