Le petit village
de Rennes‑le‑Château est aujourd'hui un lieu touristique
reconnu, perché au sommet d'une colline dite "envoutée". Mais
cette commune qui rassemble aujourd'hui moins de 100 âmes ne
fut pas aussi tranquille qu'on pourrait l'imaginer. Son
emplacement privilégié fut très vite repéré par nos ancêtres et
du haut de son oppidum, les pierres gardent la mémoire d'un
passé particulièrement mouvementé.
En fait, les recherches
actuelles montrent que Rennes‑le‑Château (Rhedae)
était, dans des temps reculés, tout aussi important que Narbonne ou
Carcassonne. Mais petit à petit, l'Histoire tumultueuse fit de cette grande
cité prospère un lieu isolé où seul un château fortifié tente fièrement
de conserver son allure d'antan, le château d'Hautpoul. |
Le blason d'Hautpoul |
Curieusement,
l'affaire de Rennes démarra après les années
1956
(date
de publication dans un journal local par
Noël Corbu) non pas
par l'exploration du château de
Rennes, mais plutôt au travers d'une curieuse stèle publiée
par Gérard de Sède
en 1967,
la stèle mortuaire de la marquise de Blanchefort.
Les premiers chercheurs et historiens
commencèrent alors tout juste à s'engouffrer dans l'histoire de Rennes et
celle de la
marquise, ouvrant le champ à une fresque épique et complexe
sur la dynastie des Hautpoul et les derniers seigneurs du Haut‑Razès.
Cette
recherche trouve aujourd'hui toute sa force, car on le sait
dorénavant, la famille d'Hautpoul‑Blanchefort fut avec différentes affaires
mêlée à
Nicolas Pavillon, au cœur du Secret au
XVIIe siècle, la stèle
étant un point d'entrée dans
cette saga mystérieuse.
Sources utilisées pour la généalogie
des Hautpoul et son histoire :
-
Rennes et ses derniers
Seigneurs (Editions
Privat 1964) par René Descadeillas
-
Manuscrit de
famille sur
l’histoire de la
Maison d’Hautpoul (Xe siècle 1864)
déposé
aux Archives départementales de l’Aude et à la Bibliothèque
Municipale de Carcassonne par Gérard Sassier
-
Rennes‑Le‑Château, le puzzle
reconstitué par Franck Daffos
Edition Pégase
|
L'histoire d'une pauvre baronnie |
Le château de
Rennes est
intimement lié à la dynastie d'Hautpoul et à ses
Seigneurs, une très ancienne famille de la noblesse française du
Languedoc. On retrouve une première trace en
936 où
Bernard‑Raymond d'Hautpoul apparaît dans la fondation de
l'abbaye de Saint‑Pons de Thomières.
En
1231,
c'est la période noire de la croisade contre les Albigeois. Tout
n'est que massacre et terreur. Rennes devient alors la propriété
de Pierre de Voisins et à sa mort, il transmet les terres
à son fils Pierre II et à son épouse
Jeanne de Voisins. Nous sommes au XIVe
siècle et Jeanne de Voisins épouse
Sicard de Marquefave.
Rennes change de propriétaire.
Une baronnie se succède alors
avec
Guillaume‑Pierre d'Hautpoul
(† 1420), puis
Armand‑Raymond d'Hautpoul
qui épouse en 1394 Hélène de Veyrac. C'est aussi à cette
époque que la seconde branche d'Hautpoul va naître avec
Auger,
auteur de la branche Hautpoul‑Féline.
Puis en
1422,
Pierre‑Raymond d'Hautpoul se marie à
Blanche
de Marquefave qui descend de la grande famille des
de Voisins. Ceci permit d'apporter en dot à la famille
d'Hautpoul, la baronnie de Rennes. C'est ainsi qu'à cette date
la famille d'Hautpoul sera liée à la destinée du Haut‑Razès,
abandonnant leur manoir situé au sud de Mazamet. Le château
de Rennes commencé au XIIIe siècle va alors rester dans la famille pendant plusieurs
siècles, mais son aspect à cette époque nous est inconnu.
Pierre‑Raymond de
Hautpoul
suivra aussi le comte de Toulouse,
Raymond de Saint Gilles, en Palestine et participera à la
croisade. |
Mazamet, le village cathare et sa
forteresse d'Hautpoul |
Mazamet est un petit
village médiéval accroché au bord d'un piton rocheux et sur
lequel une forteresse domine toute la vallée. Ce premier château
d'Hautpoul garde en réalité l'entrée de la Montagne Noire et une
immense forêt qui la recouvre. Comme d'autres villages de la
région, Mazamet n'a pas été épargné par l'Histoire. Catharisme,
croisade contre les albigeois et guerres de religion se sont
succédé entre le XIIIe siècle et le XVIIe
siècle, fournissant à notre Histoire les années les plus sombres
et les plus intolérantes du moyen‑âge. Selon la légende, la
forteresse aurait été fondée par un roi wisigoth en 413. |
En fait, c'est entre 1583
et
1640 que la fortification
prendra sa forme actuelle. Il sera construit par 3 barons
successifs :
Pierre
d'Hautpoul :
il épousa en
1583 Gabrielle de Tersac de
Monthereau
François‑Pierre
d'Hautpoul :
il
épousa en
1608 Marguerite de Saint Jean de Pontis puis Catherine de Ferrand.
En 1644
il fit enregistrer un mystérieux testament qui sera à
l'origine de l'un des mystères de Rennes.
Blaise I d'Hautpoul : coseigneur d'Ausillon, chevalier et baron
d'Hautpoul et de Rennes. Il épousa Marie‑Lucrèce du Vivier de Lansac en
1640. Il
décéda en 1694 |
Le château d'Hautpoul aujourd'hui
(Rennes‑le‑Château) |
Blaise I
d'Hautpoul
(1610‑1694) |
Tous les
passionnés de Rennes le connaissent au moins de nom, car son règne se situe à une
période très particulière de l'affaire, puisque nous sommes peu
après l'an 1645, date de la supposée découverte d'un fabuleux
trésor par
le berger Ignace Paris.
Fils du baron
François‑Pierre de Hautpoul et de Marguerite de Saint Jean de
Pointis, le baron Blaise d'Hautpoul et de Rennes fut chevalier
coseigneur d'Aussillon et ancien capitaine de la Marine. Un
jugement souverain de M. de Bezons le 4 janvier
1669 le confirma
d'ailleurs dans la baronnie du diocèse.
|
L'armoirie de la famille Hautpoul |
L'armoirie d'Hautpoul
est d'or
à 2 fasces de gueule accompagnées
de 6 coqs de sable crêtés, becqués et barbés de gueule, posés 3,
2, et 1 |
Beaucoup de mystères entourent son règne et son personnage. Que
l'on s'intéresse aux démêlés qu'il eut avec
Nicolas Pavillon,
que l'on examine les destinées de sa descendance, ou bien que
l'on enquête sur son testament, tout nous ramène à l'affaire de
Rennes et à ses interrogations.
L'un des faits
remarquables et incontestables, puisque vérifié sur d'anciens
registres, est que tous ses fils eurent des destins de grande lignée.
Alors que la baronnie d'Hautpoul à cette époque n'était qu'une
famille noble sans richesses particulières, trois d'entre eux
deviendront Chevaliers de l'Ordre de Malte et tous suivront des
carrières militaires importantes. Ce point est fondamental, car
il faut savoir qu'à cette époque, l'intégration dans un Ordre
qu'il soit militaire ou prestigieux représentait énormément
d'argent. Comment Blaise d'Hautpoul a‑t‑il pu offrir à ses fils
de telles carrières et avec quel argent ?
(Voir "Le puzzle reconstitué"
de Franck Daffos)
Blaise d'Hautpoul eut
8 fils et 2 filles :
Henry d'Hautpoul
(1642‑1695) : Il hérita des titres devenant ainsi baron à son tour.
Capitaine de cavalerie dans le régiment de Bretz, il participa à
de nombreuses campagnes de Louis XIV. Il combattit ensuite
en Catalogne jusqu'en 1678. Il finit par épouser Marie du Puy de
Vatan et eut 4 fils et une fille, assurant ainsi la
descendance.
Jean‑Antoine d'Hautpoul
(† 1674) : Chevalier de l'Ordre de
Malte. Il fut Capitaine de grenadiers et fit de grandes
campagnes comme celle de Flandre et d'Alsace ou Turenne et
Condé. Blessé à mort en 1674 à la bataille de Holzen
(Strasbourg) il fut inhumé dans l'église des cordeliers de
Limoux. Curieusement son cœur devenu relique sera protégé à
ND de Marceille. 2000 livres seront également versés pour assurer
deux
messes par semaine en son honneur et à perpétuité...
Charles‑Etienne
d'Hautpoul
(† 1722) : Malgré un premier
parcours dans l'Ordre ecclésiastique, prêtre et Seigneur du Bézu, il fut
finalement orienté
vers l'Ordre militaire sous le grade de Capitaine de cavalerie.
Il sera tué lors d'une bataille dans le Roussillon.
Aucune descendance.
Louis‑François d'Hautpoul (1652‑1696) : Il naquit le 6
octobre 1652. Chevalier de l'Ordre Malte le 2 janvier 1672, il combattit
sous de nombreuses campagnes pour le compte du roi Louis XIV.
Colonel du régiment du Languedoc‑Draguons il devint ensuite
Chevalier de l'Ordre de Saint Louis en 1693. Aucune descendance.
Louis d'Hautpoul († 1684) : Seigneur de Blanchefort et
Chevalier de l'Ordre de Malte en 1668. Il participa aux
campagnes de Turenne et Condé, sur le Rhin et en Franche‑Comté.
D'abord Capitaine dans le régiment du Bourbonnais, il mourut
sous le grade de Lieutenant colonel en 1684. Aucune
descendance.
Joseph
d'Hautpoul
(† 1698) : Colonel de Languedoc‑Dragons, il resta proche de son
frère Louis François. Également Chevalier il suivit son frère
dans les mêmes campagnes et il eut la même carrière militaire.
Aucune descendance.
Blaise
II (Blaise‑Antoine) († 1739) : Il suivit
également une carrière militaire. Chevalier, il participa à de
nombreuses campagnes en Allemagne ou en Italie. Puis ce fut en
tant que Capitaine au régiment du Roi qu'il fut nommé Chevalier
de Saint‑Louis comme son frère Louis‑François. Il se retira en
1702. Aucune descendance.
Hyacinthe
de Roquevert (1660‑1750) : Chevalier, Seigneur de Roquevert,
de Saint Just et baron de Ganac, il fit aussi un début de
carrière militaire. Capitaine au régiment royal de carabiniers
dans la brigade de Courcelles à partir de 1698 il se retira deux
ans plus tard pour se marier avec Claire de Villemur, dame de
Ganac. Il eut 1 fils et 2 filles.
Anna‑Marie
(† 1728) : Elle épousa noble Jean de Lévis, coseigneur et baron d'Ajac
Jeanne‑Marie : Demoiselle d'Aussillon. Elle se maria vers
1692 avec noble Gabriel des Innocents. |
Ces extraits proviennent du manuscrit de
famille sur
l’Histoire de la Maison d’Hautpoul (Xe
siècle – 1864) déposé aux Archives départementales de
l’Aude et à la Bibliothèque Municipale de Carcassonne par Gérard Sassier.
Ce document généalogique fut cité pour la
première fois dans un mémoire : Mémoire Diplômes
d’Études appliquées ‑ Histoire et civilisations de la
Renaissance à nos jours ‑ Analyse critique des études relatives
à Rennes‑le‑Château : aux fondements de l’histoire présenté par
Benoit Jalabert sous la direction de Mme le professeur G. Gavignaud‑Fontaine
Années universitaires 2002 ‑ 2003. |
|
Les
carrières prestigieuses de tous ses fils seraient restées bien
discrètes si deux évènements de cette époque n'étaient pas
reliés à l'affaire de Rennes :
La
découverte d'un fabuleux trésor par le berger
Ignace Paris en
1645
dans la région de Rennes‑Les‑Bains et qui se serait déroulé sur
ses terres.
Le
procès que Blaise d'Hautpoul eut avec
Nicolas Pavillon,
évêque comte d'Alet, se plaignant que des gens du Roi (Louis XIV) foulent ses terres... Le procès long et complexe se
terminera à Grenoble en avril 1666 à l'avantage de
Nicolas Pavillon, mais après que le Roi casse les jugements en
faveur de l'évêque. Ce fait historique mérite des interrogations,
car il est bon de signaler que Louis XIV et
Nicolas Pavillon
étaient particulièrement opposés. Pourquoi alors accorder un
jugement favorable à son adversaire ?
La suite est tout aussi
curieuse. Y aurait‑il eu un
arrangement financier entre les deux plaignants après ce procès‑fleuve ? Cette
hypothèse est en tout cas une
excellente explication à la subite propulsion des fils de
Blaise Hautpoul vers
des destins privilégiés et financièrement très lourds. |
Généalogie 1 : La première partie de la généalogie
d'Hautpoul est centrée autour
de Blaise I d'Hautpoul qui eut 8
fils et 2 filles |
L'Ordre de Malte est fondé au
monastère Sainte‑Marie‑des‑Latins à Jérusalem au milieu du XIe siècle par des marchands amalfitains.
Et vers 1080, un hôpital est
créé par Gérard, un supérieur du monastère. Le rôle de cet
hospice dédié à Saint Jean est d'accueillir et de soigner les
pèlerins chrétiens venus accomplir le « voyage en Terre Sainte ».
Jérusalem est alors sous domination musulmane. En 1099, la
première croisade fait basculer Jérusalem sous la domination
chrétienne, mais ce nouvel équilibre crée des tensions et de
l'insécurité dans la région.
|
Le blason de Malte |
Les frères hospitaliers sont reconnus
"Ordre monastique" le 15 février 1113 par le pape
Pascal II et deviennent vite des chevaliers hospitaliers.
Grâce au maître Raymond du Puy, l'Ordre de Malte devient
alors le second Ordre militaire
de la Terre Sainte après les Templiers fondés vers 1120. Le pape
Innocent II attribuera ensuite aux Hospitaliers et à sa demande,
le drapeau à croix blanche pour les différencier des Templiers
qui portent la croix rouge. L'Ordre a survécu jusqu'à nos
jours...
Il
est à noter la curieuse ressemblance entre une branche de la croix de
Malte et
le graphisme de la
Pierre
de Coume Sourde... |
La
descendance des Seigneurs de Rennes se poursuit donc par
Henry d'Hautpoul qui eut avec Marie du Puy de Vatan, une puissante
famille alliée à celle de la Rochefoucauld, 4 fils et une fille.
L'un d'eux, François d'Hautpoul, prendra le flambeau de
baron. Pour les autres,
Blaise III sera mousquetaire sous Louis XV,
Charles capitaine à
Royal artillerie, Joseph coseigneur de Rennes de Monthaut et
capitaine au régiment de Noailles,
Marie‑Anne sera religieuse
à Prouille.
Un document
intéressant est celui du testament d'Henry d'Hautpoul où l'on
peut lire que son souhait est d'être enseveli
dans
l'église paroissiale de Rennes‑le‑Château... |
[...] Je recommande mon âme à Dieu et à toute la Cour
céleste voulant qu'après mon décès mon corps soit enseveli dans
l'église paroissiale du dit rennes tombeau de mes prédécesseurs
et qu'après les homélies funèbres me soient faites selon la
volonté de Dame Marie Dupuy [...] |
Extrait du testament d'Henry d'Hautpoul le
24 avril 1695 |
Dans
l'hypothèse où ce document est authentique, et il n'y a aucun
élément permettant d'en douter, nous avons ici une certitude que
la crypte de l'église de Rennes contiendrait effectivement les
tombeaux des derniers seigneurs. Si tel est le cas,
Bérenger Saunière
aurait obligatoirement découvert les sépultures et pourquoi pas,
des documents importants... |
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Document testamentaire
de Henry d'Hautpoul fait le 24 avril 1695
produit par Alain Féral en 2005
(et supposé avoir appartenu à André Descadeillas) |
Après Henry, ce fut son fils
François qui prit le flambeau de la baronnie...
François d'Hautpoul (1689‑1753)
Fils
de Henry d'Hautpoul, il fut coseigneur d'Aussillon, baron d'Hautpoul, de
Rennes, et marquis de Blanchefort, seigneur de Saint‑Just le
Bézu, les Bains et Granès. En 1732,
François d'Hautpoul épousa
Marie de Négri d'Ablès
qui
deviendra la célèbre marquise de Blanchefort. Elle apporta en dot
les seigneuries de Niort et de Roquefeuil. |
Généalogie 2 |
La marquise de Blanchefort |
Nous voici donc arrivés à la fameuse
marquise de Blanchefort,
la dame de Niort et Roquefeuil, celle qui cristallisa pendant
des années l'énigme de Rennes autour d'une mystérieuse pierre,
sa stèle mortuaire soit‑disant retrouvée et burinée par
Bérenger Saunière.
Marie de Négri d'Ables fut l'épouse de François
d'Hautpoul, le dernier seigneur de Rennes‑le‑Château.
Elle représentait donc aussi le dernier espoir de la baronnie,
celui de posséder une descendance.
Sa mère est Marie
de Hautpoul‑Blanchefort qui épousa le 26 septembre
1752
son cousin, Joseph d'Hautpoul, chevalier et
marquis. La marquise eut trois filles et un fils, Joseph, mort en bas âge
en 1739. |
Acte de décès de la marquise de
Blanchefort |
L'épitaphe
de
la stèle nous rapporte qu'elle décéda le
17 janvier
1781, une date mythique dans
l'affaire de Rennes. Car non seulement on retrouve le
17
janvier, mais aussi le
17 dans l'année ainsi que le
81, rappelant le fameux
681... Hasard ?
Peut‑être, mais ceci ne signifie pas qu'il faut l'ignorer. Le ou
les codeurs utilisèrent toutes les ressources possibles pour
passer des indices. Ce hasard a été une fois de plus parfaitement
exploité.
S'agit‑il de sa vraie date de décès ? La main d'Antoine Bigou,
ancien curé de l'église de Rennes‑le‑Château, nous le confirme
comme on peut le lire sur l'acte de décès : |
La stèle de Blanchefort
reconstituée
(musée de Rhedae) |
En marge : "Obiit Dame
Marie De Nègre de Blanchefort"
L'an
mil sept cent quatre vingt un et le dix neuvième jour de
janvier, a été ensevelie par nous curé de cette paroisse
soussignée, noble Marie de nègre d'able dame de Blanchefort,
Seigneuresse de la présente paroisse, décédée le dix septième du
dit mois, âgée d'environ soixante sept ans, après avoir reçu les
sacrements de pénitence et d'eucharistie. La cérémonie de sa
sépulture a été faite en présence des Srs. Charles Vival de
Mabouillet et de ... Rougé du présent lieu figurés et en
présence de notre grande assemblée, au foy de ce. |
On trouve là
aussi la confirmation qu'elle fut, selon les termes utilisés
dans l'acte, ensevelie dans la paroisse d'Antoine Bigou.
Notons aussi que l'on parle de la paroisse dont elle
était Seigneuresse et non de son cimetière. Ceci pourrait
suggérer que sa sépulture se trouve également dans la crypte de l'église
et non à l'extérieur.
Notons enfin
l'expression "noble Marie de
Nègre d'Ables dame de
Blanchefort" qui rappelle, aux anomalies près, la formule se trouvant sur
la stèle.
Cette dernière coïncidence est
troublante, car elle voudrait dire que la représentation de cette
stèle fut dessinée soit avec l'acte de décès sous les yeux, soit en utilisant
la stèle réelle. Le codeur était en tout cas bien informé...
|
La stèle de Blanchefort
(Pierre tombale verticale)
Version de la S.E.S.A. 1906
|
Le mystérieux testament
de François Pierre d'Hautpoul
Parmi les mystères de la
famille, il existe celui du testament de l'un des barons...
Pour comprendre
ce curieux épisode, il faut revenir en
1644, date à laquelle
François Pierre d'Hautpoul, le père de
Blaise I
d'Hautpoul, fit
enregistrer le 23 novembre son testament chez
maître Captier, notaire à
Espéraza. Il y joindra des documents relatifs à la succession
des fiefs et des titres qu'il détenait depuis le XIe siècle. Malheureusement, ses héritiers ne purent jamais prendre
connaissance de cet acte ni des documents associés, car tout
disparut mystérieusement.
Toutefois, cette disparition ne
fut
que temporaire, car en 1780 le testament resurgit chez un
autre notaire, maître Jean Baptiste Siau. Ceci
permit à un descendant, Pierre d'Hautpoul, seigneur de
Seyres et fils de Hyacinthe de Roquevert
(voir généalogie 1) de le réclamer à nouveau. C'est alors que la
réponse du notaire fut incompréhensible :
« il n'y aurait pas de
prudence de ma part de me dessaisir
d'un testament de si grande
conséquence »
Décidément, ce testament semble contenir des informations
suffisamment importantes pour ne pas pouvoir les délivrer
facilement, même aux descendants de la famille d'Hautpoul. Le
mystère resta donc entier et le testament retourna dans son
secret.
En décembre
1780,
maître Jean‑Baptiste Siau confia finalement les
précieux documents à Marie de Nègre d'Ables. Elle les
remettra ensuite à
Antoine Bigou,
son chapelain, peu avant sa mort le
17 janvier 1781. Une
partie du testament fut ensuite transmis aux filles de la
marquise, mais le contenu ne sera jamais révélé.
Nous pouvons à ce stade reconnecter cette histoire avec
celle décrite par Gérard de Sède et les parchemins
supposés mis au jour par
Bérenger Saunière.
Selon la légende rennaise, Saunière aurait découvert 4
documents :
les parchemins réunis sur un document recto verso, une
généalogie des rois
mérovingiens
avec le sceau de Blanche de Castille, six lignes liées à
Saint Vincent de Paul et ce fameux testament de
François‑Pierre d'Hautpoul.
Il est aujourd'hui admis que
Saunière put difficilement retrouver ces papiers dans le pilier
de l'autel compte tenu du peu de place. Par contre, il est tout
à fait envisageable que le prêtre découvrît des papiers
importants lors de l'exploration de la crypte de son église,
soit laissés par Antoine Bigou, soit placés dans une sépulture. |
Le Château des Hautpoul à Rennes‑le‑Château vers 1900 |
Et pour
ajouter au mystère, dans le château des Hautpoul, une
boiserie sur une tête de lit montre deux blasons, celui
du baron d'Hautpoul avec la croix de David,
et celui de Marie de Nègre d'Ables. La baronie
d'Hautpoul aurait‑elle un lien avec un secret judaïque ? |
Dans le château
d'Hautpoul à Rennes‑le‑Château, une boiserie
avec les blasons d'Hautpoul et de Marie de Nègre
d'Ables. |
La
descendance de la marquise
La mort de
Marie de Nègre d'Ables marqua la fin définitive de la
baronnie de Rennes qui s'étala tout de même de
1350 à 1753, soit
cinq siècles. Sa descendance va alors se poursuivre par ses
3 filles,
Élisabeth, Gabrielle et Marie qui partageront la seigneurie, son seul fils étant mort en bas âge.
Joseph
d’Hautpoul
baptisé le 8 octobre
1737 et décédé le 8 mars
1739. Il est
enterré dans le cimetière de la paroisse tout près de la grande Croix.
Marie
Anne (ou Marianne) Gabrielle
d'Hautpoul née le 5 avril
1739 épousera le 6 avril
1767
Paul
François Vincent Marquis de Fleury qui deviendra le marquis de
Fleury Blanchefort.
Le marquisat de Blanchefort échut à la famille de Fleury par ce mariage.
En
1789, la Révolution poussera le marquis de Fleury à prendre
le chemin de l'exil.
Ils auront 4 fils et 2 filles dont
Paul
Urbain de Fleury (1778‑1836)
qui deviendra célèbre au
travers des écrits de Gérard de Sède et du
mystère de ses deux tombes. Marie
de Nègre d'Ables était donc la grand‑mère de Paul Urbain de
Fleury, et sa mère Gabrielle reçut le fameux testament mystérieux
dont on ne connaitra jamais le contenu.
Marie
d'Hautpoul épousera le 26 septembre
1752 son cousin Joseph‑Marie
d'Hautpoul Félines, lui‑même descendant de la branche
d'Hautpoul Félines (voir la généalogie 1 Auger),
ce qui permit aux branches Hautpoul Rennes et Félines de
se trouver à nouveau réunies. À partir de cette date, le château de Rennes sera inhabité.
Elisabeth
d'Hautpoul que l'on nomme aussi
Élisabeth de Nègre
d'Ables ou Élisabeth de Rennes
née en
1735,
héritera des biens de sa mère et
prendra le titre de Mademoiselle de Rennes.
Cadette de la famille,
elle resta célibataire et seule
dans le château en ruines jusqu'au
début de la restauration. Elle décéda le 10 mai 1820.
Sa fortune donnant
des signes de faiblesse, une saisie de ses biens deviendra
inévitable. Le Château
lui appartenant, il sera vendu aux enchères à son ancienne servante,
Julie
Avignon, le 2 septembre 1816 pour la somme de 52 000 F. Cette dernière est
l'épouse de Michel Captier qui sera maire de Rennes‑le‑Château en
1826. Le
château sera ensuite vendu en 1867 aux frères Dalbiès de Couiza.
Aujourd'hui,
le château appartient à la famille Fatin. |
La façade arrière du château de Rennes
vers 1900 |
Un Hautpoul sur l'Arc de Triomphe |
Comme nous
l'avons vu précédemment, la famille d'Hautpoul démarra en
936
avec Bernard‑Raymond qui contribua avec Pons 1er, comte de Barcelone et Ermengarde, vicomtesse de Béziers à la fondation de
l'abbaye de Saint‑Pons de Thomières.
À partir du XIIIe
siècle, la famille se divisa en plusieurs branches telles que
celles de Félines, de Cassagnolles, de Ventajou et de
Salettes. Les descendances sont multiples et variées.
Parmi elles, un personnage devint célèbre sous la première
période napoléonienne, Jean‑Joseph‑Ange, comte et général
d'Hautpoul.
D'après les
historiens, il serait bisaïeul de Pierre‑Raymond de
Hautpoul et de Guillaume Pictavin de
Hautpoul. |
Jean‑Joseph‑Ange
comte d'Hautpoul |
Il
naquit le 13 mai 1754 au
château de la Salette, dans le Tarn et il s'engagea à 15
ans dans la Légion corse, puis à 17 ans
comme volontaire dans les dragons de la légion du
Dauphiné. Maréchal des logis en
1776, il devint
sous‑lieutenant l'année suivante. Sa carrière fut
fulgurante. En 1792, il passe capitaine en mars
et lieutenant‑colonel en août. Le 15 octobre
1793, il
participa à la
délivrance de Maubeuge. Chef militaire exemplaire, il
est réclamé et plébiscité par ses hommes. Chef de brigade
en 1794, le 13 septembre
1795 il repart au combat de Blankenberg.
Il sera toutefois blessé à l'épaule devant Altenkirchen et se verra promu divisionnaire en octobre
1796. Il est aussi remarqué par ses actes
héroïques et se bat
courageusement à Engen et Biberach en mai
1800.
Inspecteur général de la cavalerie en 1801, il commande
en 1805 la 2ème division de cuirassés à la réserve de cavalerie de
la Grande Armée sous Murat. Le 2 décembre, il pénètre à
Austerlitz en chargeant en tête avec ses hommes.
Nommé sénateur
en mai 1806, il continua ses combats à Iéna et à Lübeck. Mais le 8
février 1807, en chargeant plusieurs fois à Eylau, un
mousquet lui ouvre la cuisse. Transporté au château
de Voren, le général d'Hautpoul,
s'éteignit dans d'atroces souffrances le
17 février
1807. Le Grand Aigle de la Légion d'Honneur n'était plus.
L'Empereur
Napoléon fit
ramener son corps à Paris et l'inhuma au
Panthéon. Il ordonna
également que l'on prenne 24 canons à l'ennemi lors de la bataille d'Eylau
et qu'on les fonde pour
faire ériger à Gaillac une statue équestre du général d'Hautpoul,
dans le costume de général de division de cuirassés.
Le nom d’Hautpoul figure
aujourd'hui sur l’Arc de Triomphe de l’Étoile à Paris.
|
Le château d'Hautpoul aujourd'hui à
Rennes‑le‑Château |
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