Ou l'histoire d'un grand Secret...

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Le tombeau des Pontils - Rennes-le-Château Archive

Le Tombeau des Pontils
ou quand Poussin montre le Bézis

Rennes‑Le‑Château ou l'histoire d'un grand secret

 

 

 

   Dans toute l'affaire de Rennes‑le‑Château, la plupart des thèmes sont curieux, insolites, remplis de coïncidences et nous font douter en permanence. Lorsqu'elles sont étudiées de plus près, ces coïncidences se révèlent souvent être des convergences de faits historiques ou biographiques.

    Le Tombeau des Pontils est un très bel exemple de ces indices convergents qui planent autour de l'énigme. Accusé par certains d'être une simple curiosité montée de toute pièce pour satisfaire le besoin de mystère, le tombeau divise encore les chercheurs et les passionnés. 


Le Tombeau des Pontils
(© photo Jean Brunelin)

   Pourtant, un fait indéniable existe : le Tombeau des Pontils ressemble à s'y méprendre à un autre tombeau peint par un grand maître du XVIIe siècle : Nicolas Poussin. Et cette toile célèbre n'est autre que "Les Bergers d'Arcadie" dans sa seconde version. Cette ressemblance suffirait‑elle à affirmer la relation entre un tombeau du Haut‑Razès et une peinture de maître ? Evidemment non. La coïncidence n'est ici qu'apparente, car derrière cette sépulture hors du commun se cache une histoire étonnement liée à l'énigme des deux Rennes. Voici le récit de ce mystérieux tombeau et ses liens avec l'affaire.

 


Le Tombeau des Pontils près d'Arques

 

Le Tombeau des Pontils et Nicolas Poussin

   Il existe dans le secteur du Haut‑Razès, ou plutôt il existait,  au lieu‑dit "Les Pontils" sur la route D613 entre Serres et Arques, un tombeau ressemblant étrangement à celui d'un tableau très célèbre : Les Bergers d'Arcadie (Version II) peint par Nicolas Poussin. Ce tombeau qui alimenta toutes les spéculations fut découvert par hasard en 1970, en pleine ébullition des chercheurs de Rennes. Et c'est Gérard de Sède le premier qui le fit connaître au public en 1972 dans un article publié sur le mensuel "Le Grand Albert", co signé avec Jean Pellet.


Le Tombeau des Pontils situé sur la carte IGN de Quillan à l'Est du méridien 0
entre Serres et Arques, non loin du mont Cardou et de la Pierre Dressée

 

   Le tombeau sera ensuite cité dans un ouvrage célèbre "La race fabuleuse" de Gérard de Sède. C'est ainsi que la sépulture des Pontils entra dans la légende des deux Rennes et que le public put prendre connaissance d'un élément majeur de l'affaire. Paradoxalement, dans l'esprit des chercheurs, le lien avec Rennes‑le‑Château se fit plus tardivement et de nombreuses erreurs furent publiées comme celle prétendant que le tombeau est très exactement traversé par le Méridien de Paris (méridien 0). En fait, ce dernier passe à environ 250 m à l'ouest, ce qui est néanmoins tout à fait extraordinaire si l'on compare cet écart avec la longueur de la méridienne passant par Paris.


Le Tombeau des Pontils ‑ Photo DR (collection privée)

 

   La similitude du Tombeau des Pontils avec celui peint par Nicolas Poussin(1594‑1665) est indéniable. D'après Gérard de Sède, le tableau arcadien fut convoité par Bérenger Saunière lors d'une visite qu'il aurait faite à Paris. Et toujours selon Gérard de Sède, le prêtre aurait acheté une copie, mais il faut admettre qu'aucune piste ne conforte cette thèse. D'ailleurs, le Musée du Louvre ne vendait aucune copie à cette époque. Il n'en demeure pas moins que le tableau énigmatique reste étrangement lié aux deux Rennes par son histoire et par la scène qu'il représente.

 


 

"Les Bergers d'Arcadie" (Version II) par Nicolas Poussin
faussement daté entre 1638 et 1640, plus vraisemblablement peint vers 1655

 

   Ce fut sans aucun doute avec stupeur que l'inventeur du Tombeau des Pontils contempla en 1970 le monument en tout point identique au tableau. La tombe de pierre se trouvait à la sortie d'un virage, sur la route départementale 613 qui relie Couiza avec Arques, perchée sur une protubérance rocheuse près du hameau des Pontils et non loin de Rennes‑le‑Château. La sépulture avait la forme d'un parallélépipède dont les bords supérieurs étaient biseautés, le tout posé sur un petit socle en pierre identique au tableau. Enduit d'une couche de ciment, il ne portait aucune inscription.

 

   Si l'on compare le tableau avec le Tombeau des Pontils et si l'on prend soin d'observer ce dernier dans la bonne direction, la ressemblance est frappante.  Un paysage arboré entoure le monument et il ne manque que les bergers poussiniens pour créer une parfaite illusion. En contrebas, un ruisseau partiellement asséché coule : le Rialsesse. En arrière‑plan, on trouve à droite le Cardou, et à gauche la Berco Grando ouvrant vers le Bézis.

 


Le tombeau des Pontils tel qu'on pouvait le voir avant 1988...

 

Les liens majeurs entre le tableau de Nicolas Poussin
et l'énigme de Rennes‑le‑Château

 

   Pour mesurer la portée du Tombeau des Pontils, il est d'abord nécessaire de comprendre l'importance du tableau "Les Bergers d'Arcadie". En simplifiant, on peut affirmer que Nicolas Poussin porta à son comble son art, son ingéniosité et son érudition pour nous faire parvenir un Secret très important à travers une toile d'exception. À première vue, le tableau offre une démonstration évidente du talent du maître et une très belle scène allégorique. Or, son histoire, ses propriétés géométriques, et son paysage emprunté aux montagnes du Haut‑Razès en font une oeuvre unique qui prouve son importance et son lien avec l'énigme des deux Rennes. N'oublions pas que durant l'affaire Fouquet Louis XIV chercha l'oeuvre durant plusieurs années pour enfin l'acheter et la consigner définitivement dans ses appartements privés. Autre preuve de sa valeur exceptionnelle, la scène d'Arcadie fut reprise par de nombreux artistes, initiés ou non, et sous différentes versions...

 

Des liens majeurs existent entre le tableau des Bergers d'Arcadie et l'énigme de Rennes‑le‑Château :

 

   Les profils montagneux peints sur le tableau sont une copie extrêmement réaliste de trois monts situés dans le Haut‑Razès. Au centre, on trouve le Bugarach ou plus exactement la Pique Grosse (vu depuis le Cardou), à gauche le Cardou (vu depuis la falaise du Bézu), et à droite la falaise du Bézu  et son château dit des Templiers (vue depuis la Pique Grosse). Ces trois sommets de montagne forment un Triangle d'Or... Le Triangle d'Or arcadien...
 

   Sur le tombeau de Poussin, au centre du tableau, est inscrit un texte pointé par le doigt de l'un des bergers : "ET IN ARCADIA EGO" , une inscription qui est aussi présente sur la dalle de Blanchefort.
 

   D’après une lettre de l’abbé Fouquet à son frère surintendant des finances Nicolas Fouquet, Nicolas Poussin aurait été initié à un ténébreux mystère...

 

   Selon l'histoire officielle racontée par Gérard de Sède, c'est lors de sa supposée visite  à Paris en 1892, consécutive à la découverte des parchemins, que Bérenger Saunière aurait demandé une copie de ce tableau au Louvre...

 

   La sentence issue du Grand parchemin "BERGERE, PAS DE TENTATION QUE POUSSIN TENIERS GARDENT LA CLE..." désigne sans équivoque le tableau des Bergers d'Arcadie.

 


Ancienne photo couleur du Tombeau des Pontils (1970)

 

Pourquoi le Tombeau des Pontils
est‑il lié à l'énigme de Rennes‑le‑Château ?

 

   Il existe quatre faits essentiels reliant incontestablement le Tombeau des Pontils à l'énigme :

 

   Le Tombeau des Pontils possède une situation géographique particulière : il est situé à 250 m à l'ouest du Méridien 0 appelé également le Méridien de Paris, entre Peyrolles et Serres, près d'Arques. Ce méridien bien connu des passionnés est au cœur de l'énigme.
 

   Le Tombeau des Pontils participe aux tracés géométriques et aux alignements topographiques de la région.
 

   Il existe une ressemblance frappante entre le Tombeau des Pontils et le tombeau peint par Nicolas Poussin dans sa seconde version des Bergers d'Arcadie. Les deux tombeaux sont identiques en termes de dimension et de forme. Cerise sur le gâteau, le Tombeau des Pontils a été édifié de façon à pouvoir l'observer depuis la route, selon la même orientation que sur le tableau. 

 

   Une dalle trouvée  près du tombeau aurait été transportée depuis les Pontils à Rennes‑le‑Château et aurait servi de pierre tombale à la marquise de Blanchefort. Cette dalle portait selon la légende la formule : "ET IN ARCADIA EGO"... S'agit‑il de la dalle de Blanchefort ?

 

L'histoire du Tombeau des Pontils

   Nous devons le premier récit du tombeau à Franck Marie dans son livre "Études critiques" paru en 1978.

 

   À l'origine, le "Moulin des Pontils" était une propriété située entre Couiza et Arques. Elle fut achetée en 1880 par Louis Galibert et son épouse Élisabeth. Son idée était de convertir la grande maison en une usine pour la fabrication d'épaulettes et de chaussures militaires. Un barrage et une dynamo furent également construits sur le cours d'eau qui avait à cette époque un débit suffisant pour fournir en électricité les machines.

 

   En 1903, Jean Galibert, le petit fils de Louis Galibert, fit creuser une tombe pour sa femme et sa grand‑mère par Mr Bourrel, un tailleur de pierre de Rennes‑les‑Bains. La tombe simple était à l'endroit que l'on connaît aujourd'hui, sur un tertre naturel. Puis en 1904, Jean Galibert y déposa la dépouille de sa grand‑mère Elisabeth Galibert.

 

    En 1921, la famille Galibert vendit la propriété des Pontils et quitta Peyrolles pour enménager à Limoux. Les Galibert achetèrent une concession (n° 647) au cimetière de la ville, et le 12 décembre 1921, ils firent construire un caveau. La porte et les parements en pierre de taille du Tombeau des Pontils servirent à couvrir la sépulture de Limoux. Enfin, les restes d'Élisabeth Galibert y furent transférés. 

 

Le tombeau de la famille Galibert aujourd'hui installé dans le cimetière
de Limoux.

 

Notons aussi le nom "Raynaud", un patronyme également impliqué dans l'affaire...

 

    Le domaine des Pontils devint alors la propriété de Mme Emily Rivarès, une femme française née à Paterson aux États‑Unis et de son fils, Louis Bertram Lawrence.

    La grand‑mère de Louis Lawrence, Marie Rivarès, mourut le 28 novembre 1922 après s'être déplacée aux Pontils. Selon son souhait, elle fut embaumée et déposée dans le tombeau des Galibert.


L'intérieur du tombeau en 1972

 

   Existait‑il une tradition familiale liée à l'embaumement ? Le fait est que vers 1931suite à la mort de sa mère, Louis Lawrence attendit quelque temps avant de se livrer à des scènes étranges. D'après les témoins de l'époque, il ne fit rien de moins que d'embaumer le corps de sa mère et ses deux chats, selon la volonté de la défunte. Il plaça ensuite les dépouilles dans le tombeau.


Louis Lawrence jeune


Louis Lawrence

 

   Par la suite, Louis Lawrence s'installa aux Pontils et fit refaire la sépulture. C'est à cette époque, entre 1931 et 1932, que curieusement on érigea sur la tombe une forme parallélépipédique surmontée d'une pyramide tronquée recouverte d'un enduit cimenté. La tombe prit alors l'apparence exacte du Tombeau des Bergers d'Arcadie.

  
Mr Bourriel, tailleur de pierre, prenant les mesures du tombeau

 

   Louis Lawrence était un homme érudit, diplômé des hautes écoles aux États‑Unis.  Il mit au point un poste TSF portable antiparasites qu'il commercialisa lui même. Il mourut le 25 juillet 1954 à Carcassonne dans la misère, et après avoir dépensé l'important héritage de sa mère.

 

    Le Tombeau des Pontils n'est malheureusement plus visible aujourd'hui...

 

Il fut détruit par son propriétaire
le 9 avril 1988.

 

 Celui‑ci, lassé de voir des curieux et des chercheurs de trésor sans scrupules occasionner des dégâts dans sa propriété, il décida de supprimer définitivement le tombeau...
Il est vrai qu'il menaçait depuis longtemps un passage à l'acte...

 

C'est un témoignage et un monument perdu à jamais pour les générations
à venir...


Paru dans un journal local. À noter que l'article introduit une erreur puisqu'en 1903 le propriétaire n'était pas Louis Lawrence, mais les Galibert. Et le tombeau poussinien fut érigé entre 1931 et 1932.

 


Le Tombeau aujourd'hui

Aujourd'hui, le paysage arcadien n'est plus, et les traces du passé s'estompent peu à peu.

    Le Tombeau des Pontils n'est qu'un souvenir pour les anciens chercheurs, et des photos témoignent de son existence.
On peut encore observer le socle et une dalle de béton plate faite après la destruction, marquée d'une croix.

 L'avenir dira certainement qu'une pièce importante du puzzle de Rennes disparut par la bêtise et l'ignorance de certains...

Pour les curieux, il reste le tertre rocheux qu'il faut repérer à la sortie d'un virage.


L'emplacement du Tombeau des Pontils en 2005

 

   Le tombeau ne manqua pas de fasciner en tout cas les premiers chercheurs et les journalistes de la BBC, dont John Stone qui se prit au jeu en posant au pied du tombeau et en imitant l'un des Bergers arcadiens.  On était encore loin à cette époque de se douter des méandres de l'énigme et de son développement à venir...


John Stone de la BBC au pied du tombeau en 1971
imitant l'un des Bergers d'Arcadie

 

Pure coïncidence ou mise en scène ?

Des traces d'un tombeau ou d'un cénotaphe plus ancien

  

   Il est clair que si l'on se fit à l'histoire officielle, le Tombeau des Pontils aurait été creusé en 1903 et aurait pris sa forme définitive arcadienne entre 1931 et 1932 grâce à Louis Lawrence. Le tombeau serait donc né en plein XXe siècle, ce qui est une raison essentielle pour affirmer que Nicolas Poussin n'a pas pu s'inspirer de ce lieu pour composer sa dernière version des Bergers d'Arcadie. La ressemblance ne serait donc que fortuite, ou voulue par Louis Lawrence pour d'obscures raisons... A moins que...

 

   Ces déductions semblent évidentes ; pourtant durant de nombreuses années, les chercheurs et auteurs ne cessèrent de poser le problème à l'envers : à quel moment Poussin serait‑il venu au Pontils pour peindre le tableau ? Cette question sans issue donna du grain à moudre aux nombreux détracteurs qui n'hésitaient pas à balayer d'un revers de main toutes les curiosités liées à Rennes‑le‑Château. Le Tombeau des Pontils ne serait qu'une invention des chercheurs de Rennes afin d'embellir une histoire rocambolesque et sans fondement. La présence du tombeau à cet endroit ne serait qu'une magnifique coïncidence. Si l'on ajoute à cela que Nicolas Poussin, dont on connaît parfaitement sa biographie, ne vint jamais dans le Razès, l'affaire devrait être définitivement entendue. Il ne restait plus que Gérard de Sède et quelques illuminés pour souligner la remarquable curiosité.

 

   La célébrité naissante de cette tombe aurait donc dû s'arrêter là. Or, dans l'affaire de Rennes, une seconde approche est souvent nécessaire. Car d'autres faits s'ajoutent à l'histoire locale. Il se trouve par exemple que des recherches menées par Alain Féral nous apprennent que ce lieu précis aurait déjà servi au XVIIIe siècle, et on pouvait y trouver un monument tel qu'un lieu de recueillement ou un cénotaphe.

 

Il existe en France de nombreux cénotaphes d'apparence très variés et qu'il ne faut pas confondre avec des tombeaux.Tous ont pour objet de commémorer un lieu ou une mémoire comme celui de Château‑de‑Randon (Lozère) en souvenir au célèbre connétable Bertrand Duguesclin.

Exemple de cénotaphe, celui de Bertrand Duguesclin
(ancienne carte 1900)

 

   Il existe aussi un autre témoignage historique rapporté par Alain Féral et qui parle d'une dalle précieuse près de Serres qu'il conviendrait de protéger :

  Ce tombeau serait cité dans un ouvrage du XVIIIe siècle de l'abbé Delmas et serait décrit avec sur sa face nord une pierre verticale qui porterait cette devise : "ET IN ARCADIA EGO"
 

  Cette pierre aurait été transportée en 1789 au cimetière de Rennes‑le‑Château. L’abbé Antoine Bigou se serait ensuite occupé de celle‑ci pour compléter la sépulture (la dalle) de la Marquise de Blanchefort. Il existerait d'ailleurs dans les archives de l’Évêché, un document de la main du prêtre portant sur le transfert de cette dalle de Serres à Rennes‑le‑Château et effectué par un certain Guillaume Tiffou en novembre 1789.

   Enfin, il ne faut pas oublier que le Tombeau des Pontils est situé à 250 m du Méridien de Paris. Cette coïncidence ajoute un doute supplémentaire à un dossier déjà bien épais. D'ailleurs, le tombeau est aussi situé sur des alignements topographiques remarquables... Serions‑nous uniquement en présence d'une simple série de coïncidences ?

 

   Autre fait  : un ancien cadastre rapporte qu'un moulin à blé était situé sur la rivière et appartenait à Mgr le duc de Joyeuse. A l'ouest du hameau des Pontils un cimetière était présent.

   Le duc de Joyeuse, en fait Anne de Joyeuse, est le plus représentatif des membres de la maison de Joyeuse, filleul du connétable Anne de Montmorency. Il était baron d'Arques, baron héréditaire de Languedoc, vicomte, puis duc de Joyeuse, dit Joyeuse, né en 1560 sans doute au château des ducs de Joyeuse à Couiza, (moins probablement au château de Joyeuse ) où sa famille s'installe en 1552. Militaire français du XVIe siècle et Amiral de France, il était l'un des mignons du roi Henri III. Il mourut le à la bataille de Coutras en Gironde où son infanterie et sa cavalerie furent décimées. Constitué prisonnier, il fut reconnu et tué d'un coup de pistolet. Il sera enterré à Montrésor en Indre‑et‑Loire.

 

  
L'emplacement du Tombeau des Pontils sur la carte d'État Major 1866

 

    De toute évidence, les traces d'un ancien lieu de recueillement ou de souvenir semblent avoir existé, et nous sommes bien loin d'un site choisi par hasard par la famille Galibert pour édifier une sépulture.

   Gérard de Sède
et de nombreux chercheurs ont longtemps voulu apporter une explication sans faille à ce mystère. C'est ainsi que durant de nombreuses années, des éléments sont venus s'ajouter à l'énigme des Pontils, semant la confusion. Les contradictions rapportées par les chroniqueurs sont en effet multiples et l'une d'elles est celle‑ci : Comment
Nicolas Poussin aurait‑il put peindre un paysage avec un tombeau qui ne prit forme que vers 1931 ?

   Il faudra attendre les années
2005 pour qu'enfin des questions essentielles soient correctement posées. Avons‑nous obtenu depuis quelques réponses ? Pas vraiment, tout juste quelques hypothèses étayées par des faisceaux d'indices convergents. Néanmoins, des pistes sérieuses de recherche existent indéniablement, et c'est déjà beaucoup pour un Secret qui n'aurait jamais dû être connu du public.


Le Tombeau des Pontils, du temps où il existait encore...

 

Quelques questions essentielles...

   Si Nicolas Poussin n'est jamais venu dans le Razès, comment expliquer qu'il ait peint "Les Bergers d'Arcadie" avec un paysage issu des environs de Rennes‑le‑Château ?

 

    On le sait aujourd'hui, Nicolas Poussin n'est jamais venu dans le Haut‑Razès. Et pourtant "Les Bergers d'Arcadie" affiche en fond de toile trois sommets proches de Rennes‑le‑Château : le Cardou, la Pique Grosse du Bugarach, et la falaise du Bézu, le tout formant un Triangle d'Or.

 

    Or, il faut se souvenir d'Ambroise Frédeau, moine des Augustins de Toulouse, et peintre du fameux Saint Antoine de ND de Marceille. Les attaches familiales et professionnelles d'Ambroise Frédeau nous confirment qu’il connaissait personnellement deux peintres : Teniers et Poussin, deux noms que l’on retrouve précisément cités dans la mystérieuse sentence :

 

« BERGERE PAS DE TENTATION QUE POUSSIN TENIERS... »

 

   De plus, Ambroise Frédeau (1589‑1673) était un excellent ami de Nicolas Poussin, et à ce titre, il fournissait au maître des Andelys des peintres toulousains comme Jean‑Pierre Rivals, un artiste régional bien connu. Or, Ambroise Frédeau utilisait de temps en temps un atelier de l'Ordre des Augustins situé entre Limoux et Alet. Plusieurs artistes étaient donc capables de préparer des fonds de tableau de la région du Haut‑Razès. Il était d'ailleurs courant que les maîtres utilisent des toiles préalablement préparées.

 

   Les trois montagnes autour de Rennes‑le‑Château ont donc pu être esquissées par l'un des anciens élèves d'Ambroise Frédeau et selon un cahier des charges précis. Il était ensuite facile pour Poussin de poursuivre et de concevoir la seconde version des Bergers d'Arcadie...

 

Nicolas Poussin n'ayant pas pu s'inspirer du Tombeau des Pontils qui n'existait pas encore, qui eut l'idée d'édifier la sépulture à l'image des "Bergers d'Arcadie" ?

 

   La ressemblance est incontestable : même forme, mêmes proportions, mêmes dimensions, même socle. Qui diable aurait‑pu imaginer une telle ressemblance ? Qui aurait voulu qu'à cet endroit précis un tombeau soit érigé à l'image de celui de Poussin ? Qui est à l'origine de cette mise en scène arcadienne ? À l'image d'une enquête policière, ces questions reviennent à celles‑ci : qui avait intérêt à transposer la scène arcadienne dans ce lieu‑dit ? Et surtout, parmi les personnages de l'affaire, qui pouvait être capable de monter un tel jeu de piste ?

 

   Bien sûr, on pourrait supposer que l'initiative vint de Louis Lawrence, mais rien ne laisse présager chez ce scientifique un quelconque intérêt pour les deux Rennes et ses mystères, d'autant que l'affaire n'était pas encore publique à son époque. Un autre nom vient à l'esprit : Henri Boudet, un prêtre qui manie aussi bien la Langue des Oiseaux que les codages celtes, un prêtre qui connaissait parfaitement le terrain et la population locale. Or, le tombeau fut érigé entre 1931 et 1932, bien après la disparition de Boudet en 1915.


   Il reste un
nom : Jean Jourde, un prêtre de l'ombre impliqué dans le projet du Domaine de Saunière et dans plusieurs codages, lazariste de surcroît.
Nous savons que le tombeau fut creusé à l'origine en 1903 par le maçon Bourrel de Rennes‑les‑Bains, or Jourde devait très bien le connaître. En effet, vers 1915, alors qu'il devient Supérieur des Filles de la Charité à Montolieu, Jourde effectue à partir de cette année de nombreuses visites à Rennes‑les‑Bains pour ses rhumatismes. De plus, c'est en 1921 que la famille Lawrence devint propriétaire, une date postérieure à la création de plusieurs indices laissés par Jourde.

 

    Jean Jourde savait aussi certainement que le tableau de Poussin est un indice fondamental pour l'énigme. L'idée géniale aurait donc consisté à figer dans un décor réel le tableau pour attirer l'attention, mais où poser ce décor ? Quoi de plus naturel que de construire le tombeau non loin du fameux Méridien de Paris ? L'initié pourra vite faire le rapprochement...

   Le plus difficile reste pourtant à faire : convaincre le propriétaire Louis Lawrence d'édifier un tombeau à l'image de celui de Poussin sans trop éveiller les soupçons. Or il est très facile pour un Père lazariste d'influencer une famille. Jourde aurait‑il suggéré à Louis Lawrence de construire une sépulture arcadienne ? Connaissait‑il la vraie raison de cette tombe "poussiniène" ? Pas sûr...


Photo DR ‑ Collection privée

 

Pourquoi créer aux Pontils un tombeau qui ressemble parfaitement à celui des Bergers d'Arcadie ?

 

   Si l'on considère que Jean Jourde connaissait la valeur du message des Bergers arcadiens, il est facile d'imaginer que l'édification du tombeau dût représenter pour lui non seulement un véritable symbole, mais également un réel projet.
   Et si l'on tient compte de l'intelligence présente dans des indices tels que le Grand parchemin ou la stèle de Blanchefort, comment ne pas supposer que le Tombeau des Pontils cache une autre lecture ? Dans une première analyse, le tombeau rappelle évidemment celui de Poussin, mais existe‑il une seconde interprétation ? Un second message plus subtil ? Plus occulte ?

 

     Mémorisez la scène arcadienne en observant le tableau de Poussin,
et placez‑vous devant le Tombeau des Pontils depuis la route, en vous orientant exactement comme si vous regardiez le tableau.

Puis, observez le paysage...  

 

 

    L'exercice est étonnant et John Stone de la BBC n'imaginait certainement pas participer sans le vouloir en 1971 à une véritable mise en scène orchestrée par des érudits initiés. En effet, l'ancienne photo du journaliste imitant l'un des Bergers laisse entrevoir un détail devenu fondateur aujourd'hui. Observez bien la photo N&B et vous verrez au‑dessus de son épaule, au loin, la Tête de l'Indien.

   Car le Tombeau des Pontils n'a pas été placé ni orienté par hasard. En regardant le Tombeau des Pontils tel que Poussin, votre regard est exactement aligné à la Vallée sacrée du Bézis, avec à gauche la Tête de l'Indien et à droite le Roc di Quiloutié.

 


La Vallée sacrée du Bézis
à gauche la Tête de l'Indien, et à droite le Roc di Quiloutié

 


La Tête de l'Indien marque l'entrée dans les gorges du Bézis

 

   La construction du Tombeau des Pontils permet non seulement d'attirer l'attention sur l'oeuvre des Bergers d'Arcadie de Poussin, mais aussi de poser des indices et des alignements immuables dirigés vers la vallée et les gorges du Bézis...


Vue du Tombeau des Pontils (© photo Jean Brunelin)

 

En résumé :
 

   Nicolas Poussin n'a pas peint le tombeau se trouvant aux Pontils, car ce sont des initiés qui l'édifièrent vers 1931 en référence à la célèbre scène d'Arcadie. Qui fut le commanditaire ? Aucune certitude, mais Jean Jourde semble être le seul à avoir pu mettre en place un tel clin d'oeil. Pourquoi cette mise en scène ? Et pourquoi à cet endroit ? Non seulement le tombeau permet de remonter au tableau initiatique, mais l'endroit marque un axe topographique important orienté vers la Vallée sacrée du Bézis...

  

   L'idée de donner vie au tableau de Nicolas Poussin est tout simplement géniale... Dommage que le Tombeau des Pontils fut détruit par la bêtise et l'ignorance des Hommes, un demi‑siècle plus tard...